Bonnelles est situé dans les Yvelines, à l'extrémité sud-est du massif forestier de Rambouillet.
Un ancien château, ruiné par un incendie, fut démoli en 1764. Sur son emplacement le marquis de Bonnelles fit construire un nouveau château, qu'il légua à sa nièce Anne de Bullion, épouse de François Emmanuel de Crussol, duc d'Uzès. Celui-ci fit doubler le château en 1782 et aménager le parc qui l'entoure en jardin anglo-chinois, orné de fabriques. Ce parc a été décrit par Le Rouge dans son douzième cahier des "Jardins anglo-chinois". On ne dispose guère d'autres renseignements.
Le plan que nous livre Le Rouge montre un parc d'une cinquantaine d'hectares, dont le jardin anglo-chinois n'occupe qu'un cinquième, le cœur réellement orné de ce dernier ne dépassant pas deux hectares. Mais quelle partie ! le Rocher en forme d'une tortue géante et les fabriques qui l'accompagnent composent un des tableaux les plus fameux de toute l'histoire de ces parcs (voir l'image ci-dessous). À cet endroit, la rivière anglaise s'élargit et se divise en bras autour d'îlots. L'îlot principal accueille le rocher, surmonté d'un pavillon chinois. Deux passerelles chinoises franchissent les bras de la rivière; sur le petit îlot intermédiaire se trouve le Pavillon du Philosophe.
Grâce à ce plan, j'ai pu localiser les soubassements de la rocaille au bout de la rivière anglaise, très dégradés, enfouis dans la végétation. Ces reliquats ne sont absolument pas signalés. Il faut dire qu'il serait bien difficile de sensibiliser les promeneurs à ces blocs dont la signification n'est plus lisible...
Le château de l'époque était plus proche de la limite nord-est que celui qui l'a remplacé. Une longue perspective rectiligne s'étendait en direction du sud-est bien au-delà de la limite du parc enclos et créait une continuité avec des bois périphériques moins vastes, aux petites allées sinueuses. La plus vaste de ces zones annexes correspondrait à la Réserve actuelle. Mais on ne voit pas sur le plan de Le Rouge de continuation de la Rivière anglais, ni d'étang, dont je suppute qu'il fut creusé par la suite. Le reste du parc comptait pour les deux tiers un vaste bois aux allées rectilignes, toutefois parcouru de quelques chemins sinueux. Ce plan nous apprend l'existence d'une chaumière et d'une glacière dans le coin nord-ouest, l'une et l'autre aux carrefours d'allées. La chaumière a certainement disparu : c'est le sort de ces constructions en bois, fantaisie d'un moment. La glacière, surmontée d'une rocaille massive, paraissait encore intacte sur les photos de la fin du 19°. C'est qu'il faudrait une volonté déterminée pour en venir à bout ! N'ayant pas accès à cette partie privée, je n'ai pas pu en chercher de traces mais il n'est pas exclu qu'elle soit toujours là, au bout du parc, à l'ouest du château en ruine, abritant juste quelques chauves-souris ...
À la Révolution, les Uzès émigrèrent et leurs biens furent confisqués. Le second château, laissé à l'abandon, fut démoli à la fin du 18° siècle et le domaine connut une éclipse. Il retrouva son lustre après le rachat par les Uzès de retour d'exil; Géraud de Crussol, duc d'Uzès, fit construire en 1849 par les architectes Frœlicher et Clément Parent un nouveau château à côté du précédent. Les reliquats du parc à fabriques furent englobés dans le domaine, qui est connu sous le nom de " château de la duchesse d'Uzès " car cette personnalité en vue à la fin 19°, l'occupa et le marqua de sa présence, y tenant en particulier un équipage de chasse à courre de premier plan.
En lien avec le Parc naturel de la haute vallée de Chevreuse, la commune a créé à cet emplacement une réserve naturelle pour l'observation des oiseaux et la promenade, qui englobe la pièce d'eau du parc à fabriques. Elle a restauré l'embarcadère et quatre ponts de pierre, dont le fameux pont portant un kiosque dit temple d'Amour.
A priori ce Pont d'Amour, ainsi que les trois autres fabriques existant au début des années 1900, visibles sur les cartes postales anciennes, furent ajoutés dans la seconde moitié du 19° siècle, puisqu'ils ne figurent pas sur le plan de Le Rouge : Il s'agit de la mosquée, la canardière (un petit pavillon de briques octogonal muni de meurtrières et couvert de paille) et un embarcadère (l'abri d'observation est au même emplacement mais a visiblement été reconstruit). On ne trouve pas d'étude historique précisant à quelle époque ces trois éléments ont été ajoutés mais le style de la mosquée et de l'embarcadère est clairement de la dernière partie du 19°
La pièce d'eau, dite aujourd'hui étang des trois ducs, garde beaucoup de charme, mélange de sauvagerie et de reliquats raffinés, en particulier de grands arbres aux espèces choisies, l'île et les ponts. De la rive de l'étang en retour du temple d'Amour, on a une vue saisissante sur l'ensemble. Bien que cette pièce d'eau ne fisse pas partie du parc du 18° décrit par Le Rouge, la conjonction de ces éléments permet de trouver là l'esprit des parcs à fabriques. Malheureusement une végétation sans valeur occulte la perspective vers le château qui apparaît sur les cartes postales anciennes. Pour le voir, il faut s'avancer plus loin vers la grande pelouse, qui s'ouvre sur le château, d'allure imposante malgré son délabrement. La rivière anglaise serpente sur le côté droit. Il est prévu de la curer. Cette partie est une propriété privée.
Pont en retour du temple d'amour, franchi par le chemin longeant l'étang des trois ducs. |
Pont au bord du petit étang, enjambant le canal provenant de l'étang des trois ducs. |
Je les identifie de façon quasiment certaine au soubassement du fameux Rocher disparu, sur lequel était posé un petit pavillon chinois. Ce sont les seuls restes des fabriques du XVIII° siècle, avec peut-être la glacière. |
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La réserve naturelle est un lieu public que l'on peut visiter a priori à toute heure, même de nuit. Pour préserver la quiétude de la faune, les chiens sont interdits.
Accès : sortir de Bonnelles en direction de Saint-Arnoult-en-Yvelines. À moins d'un kilomètre on voit sur la droite le premier étang et, à gauche, une station d'épuration. Au bout du mur de clôture, à droite, grille donnant accès à la réserve. Autre accès possible par le nord en longeant les terrains du stade, dans le pré sous l'église.